La Cour pénale internationale (CPI) a condamné mercredi l'ancien vice-président congolais Jean-Pierre Bemba à un an de prison et 300.000 euros d'amende pour subornation de témoins dans le cadre de son procès pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité.
"La chambre vous inflige, M. Bemba, une peine supplémentaire (...) d'un an d'emprisonnement", a déclaré le juge Bertram Schmitt, "servie suite à votre peine actuelle" de 18 ans d'emprisonnement. M. Bemba avait en effet été condamné en juin à 18 ans de prison pour la vague de meurtres et de viols commis par sa milice en Centrafrique entre octobre 2002 et mars 2003.
La décision des juges fait jurisprudence pour ce tribunal chargé de juger les pires crimes de l'histoire, pour qui le problème de la subornation de témoins est récurrent. "Le type de peine décidé, légère ou lourde, donnera un message très clair sur la gravité du crime", assure à l'AFP Mariana Pena, de l'ONG Open Society Justice Initiative.
Déjà condamné à 18 ans de prison au terme de son premier procès, Jean-Pierre Bemba avait vu le procureur requérir huit années d'emprisonnement supplémentaires à la fin de ce procès connexe, le premier de ce type à la Cour.
L'ancien riche homme d'affaires de 54 ans a déjà écrit l'histoire de la CPI quand il a été condamné en juin pour la vague de meurtres et de viols commis par sa milice, le MLC, en Centrafrique entre octobre 2002 et mars 2003.
En cinq mois, quelque 1.500 hommes du MLC ont tué, pillé et violé en Centrafrique, où ils s'étaient rendus pour soutenir le président Ange-Félix Patassé face à une tentative de coup d'Etat menée par le général François Bozizé.
Pour cette juridiction, il s'agit de la plus lourde peine jamais imposée, de la première condamnation de l'usage de viols et violences sexuelles en tant que crimes de guerre, de la première peine rendue contre un ancien vice-président et contre un commandant militaire, en vertu du principe de la "responsabilité du commandant".
Celui qui est surnommé le "Mobutu miniature" a interjeté appel de sa condamnation fin septembre, dénonçant des "vices de forme" et évoquant notamment l'arrestation de son avocat durant le procès.
Témoins corrompus
En octobre, l'ancien vice-président avait été reconnu coupable d'avoir corrompu 14 témoins, présenté de fausses preuves et sollicité la déclaration de faux témoignages.
Les juges avaient alors eu des mots très durs contre Jean-Pierre Bemba et ses quatre proches assurant notamment qu'"aucun système légal au monde ne peut accepter que des témoins soient soudoyés, incités à mentir ou briefés".
L'ancien chef de guerre, ses avocats Aimé Kilolo et Jean-Jacques Mangenda, ainsi que le député du parti Mouvement de Libération du Congo (MLC), Fidèle Babala, et le témoin de la défense, Narcisse Arido, avaient versé de l'argent et donné des cadeaux à des témoins ou leur avaient promis une réinstallation en échange d'un faux témoignage devant la CPI.
Aimé Kilolo était chargé de leur donner les instructions et a effectué ou facilité les transferts d'argent. Fidèle Babala a pour sa part encouragé M. Bemba à assurer "le service après-vente". "Il est bon de donner du sucre aux gens", lui avait conseillé le député du MLC, faisant référence aux pots-de-vin.
Témoin agissant comme "intermédiaire", Narcisse Arido a recruté quatre des témoins corrompus, leur promettant 10 millions de francs CFA (environ 15.200 euros) et un déménagement en Europe.
La décision des juges pourrait "dissuader de possibles personnes de commettre ce type de crime", assure Mme Pena. Selon son ONG, les problèmes de subornation de témoin auraient déjà eu des conséquences sur plusieurs procès à la CPI.
Les poursuites contre le président kényan Uhuru Kenyatta et contre son vice-président William Ruto avaient notamment dû être abandonnées faute de preuves, après des procédures marquées par des allégations de subornation de témoins.
Avec AFP
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